FISCALITE: UN ABATTEMENT POUR LA CONSTRUCTION
ARGENT
Un abattement pour la construction
(Intérêts Privés)
Donations de terrains
Un abattement exceptionnel va être mis en place, à titre temporaire, pour favoriser les donations en faveur des enfants, du conjoint ou du partenaire.
Deux mesures de la loi de finances pour 2015, en cours d'adoption, créent un nouvel abattement temporaire qui peut atteindre 100 000 € pour le calcul des droits de donation et se cumule avec les autres abattements existants. Les donations familiales de terrains à bâtir et d'immeubles neufs sont ainsi nettement favorisées, ce qui est une bonne nouvelle pour la transmission de patrimoine. Et dans l'ambiance déprimée de l'après-ALUR, c'est un signe susceptible de redonner confiance au secteur de l'immobilier, pour, au final, développer les emplois du bâtiment. « Avec ces nouvelles incitations en faveur des donations, il s'agit de disposer de plus de foncier en circulation, pour construire plus, avec toutefois un effet attendu à quelques années devant nous », résume Frédéric Roussel (notaire à Lille). Explications.
Terrains à bâtir : donner pour faire construire
Pour inciter à la transmission de terrains en vue d'y construire des logements neufs, les donations de terrains à bâtir réalisées en pleine propriété, constatées par un acte authentique signé entre le 1er janvier et le 31 décembre 2015, bénéficieront d'un abattement exceptionnel de 100 000 € dans la limite de la valeur déclarée de ces biens. Ce montant est réservé aux donations consenties au profit d'un descendant (enfant, petit-fils, petite-fille, etc.) ou d'un ascendant en ligne directe (parent), du conjoint ou du partenaire pacsé. Le montant de l'abattement passe à 45 000 € si le bénéficiaire de la donation est un frère ou une soeur, et à 35 000 € s'il s'agit d'une autre personne. « L'exonération est temporaire, avec une fenêtre de tir d'un an », souligne Frédéric Roussel. « L'effet de la mesure, que le notariat réclamait depuis un bon moment, se fera sentir dans quelques années. » En effet, le donataire (bénéficiaire de la donation) doit prendre pour lui et pour ses ayants cause (c'est-à-dire les acquéreurs du terrain, s'il le revend par la suite) l'engagement d'y faire construire des locaux neufs, destinés à l'habitation. Construction qui devra être achevée à l'expiration d'un délai de 4 ans à compter de la date de la donation. Exemple : J'ai acheté ma maison en banlieue il y a 10 ans, avec un terrain un peu trop grand. Une partie du terrain, qui est constructible, est « détachable » de la partie construite. Si je vends cette parcelle, je serai soumis à l'imposition de la plus-value. En effet, la partie comprenant la maison est exonérée (c'est ma résidence principale), mais pas le terrain nu qui est cédé. « Si des parents réalisent d'abord une donation du terrain constructible, à leur fils, par exemple, ils éteignent la plus-value », explique Frédéric Roussel (voir hors-texte). C'est là que la mesure d'incitation entre en jeu, car pour des époux propriétaires ensemble du terrain (bien commun du couple), l'abattement sur la valeur du bien donné atteindra 200 000 € (100 000 € par parent), et pourra même se cumuler avec l'abattement en ligne directe s'il n'a pas déjà été utilisé (100 000 € par parent également). Attention ! Même sans impôt, la donation entraîne des frais d'acte de notaire (3 165,68 € pour un terrain à bâtir valant 100 000 €).
Immeubles neufs : acheter pour donner
La deuxième mesure incitative concerne les donations en pleine propriété de biens immobiliers neufs à usage d'habitation. Cela concerne les logements dans des immeubles pour lesquels un permis de construire a été obtenu entre le 1erseptembre 2014 et le 31 décembre 2016. La donation devra alors être signée chez le notaire au plus tard dans les 3 ans suivant l'obtention du permis, appuyée de la déclaration attestant l'achèvement et la conformité des travaux. L'immeuble ne devra jamais avoir été occupé ou utilisé, sous quelque forme que ce soit, au moment de la donation. Les montants d'abattements seront les mêmes que dans le premier dispositif : 100 000 €, 45 000 € ou 35 000 € selon le lien de parenté entre donateur et donataire. « En pratique, ces donations devraient porter sur des queues de programmes, c'est-à-dire des opérations de promotion dans lesquelles il y a des appartements qui ont du mal à se vendre », commente Frédéric Roussel. Il s'agit d'inciter des personnes disposant d'un important patrimoine à investir dans le neuf puis à transmettre le bien acquis, en anticipation de leur succession et hors impôt. Un dispositif semblable avait déjà très bien fonctionné dans les années 70. « L'objectif, cette fois, est de relancer des projets de construction qui étaient en panne », précise Frédéric Roussel. « Et il y en a plein les tiroirs ! »
Attention ! Dans les deux cas (terrains à bâtir et immeubles neufs), il s'agit de donations en pleine propriété (pas de réserve d'usufruit possible), ce qui suppose que le donateur peut se permettre de s'appauvrir, sans mettre en péril ses propres intérêts...
Une donation pour neutraliser la plus-value
Le régime d'imposition des plus-values des terrains à bâtir réalisées en cas de vente a été modifié dans un sens incitatif, toujours dans l'objectif de libérer du foncier. Depuis le 1er septembre 2014, il est aligné sur celui des immeubles bâtis, avec, en plus, un abattement exceptionnel et temporaire de 30 % (voir IP 725, novembre 2014, p. 21). Mais quid lorsqu'on est propriétaire d'un bien qui n'est ni un logement neuf, ni un terrain à bâtir, et que l'on se trouve hors des nouveaux dispositifs d'exonération de droits de donation ou d'allégement de la plus-value les concernant ? C'est le cas par exemple pour un logement locatif ancien. Si j'ai acheté pour 35 000 €, il y a 15 ans, une belle chambre de bonne à Paris, et que son prix aujourd'hui tourne autour de 100 000 €, la plus-value est encore taxable... Pour la « neutraliser », j'ai tout intérêt à faire donation de la chambre à l'un de mes enfants : il n'aura pas de droits de donation à payer (si la valeur du bien ne dépasse pas 100 000 €) et, quant à la taxation de la plus-value lors d'une revente ultérieure, elle sera calculée non pas en partant du prix initial de 35 000 €, mais de la valeur du logement au moment de la donation.
Remarque: 3165,68€
Frais de notaire à payer pour rédiger l'acte de donation d'un terrain à bâtir valant 100 000 €.